Transpyrénéa la désillusion des bénévoles exclus entre colère et incompréhension

Témoignage de Nathalie Wurry

Transpyrénéa : de la fierté du finish à la désillusion du bénévolat

Témoignage Nathalie Wurry : Participante et finisher 1ère édition 2016 – Bénévole en 2023. De participante combative en 2016 à bénévole écartée en 2023, Nathalie témoigne des failles d’une organisation où la rudesse a trop souvent pris le pas sur le respect humain.

Aux origines de la Transpy – une édition rustique aux conséquences lourdes

Je fais partie de la première cohorte de « Transpy », ceux qui ont eu la chance de participer à l’édition inaugurale de 2016. Une édition très « rustique », certes, mais annoncée comme telle. Nous avions accepté ce contrat, conscients des limites de l’organisation.

Pourtant, cette rusticité a rapidement ouvert la voie à des comportements déviants. Certains ont tenté de contourner les règles, comme l’obligation de porter 7 000 calories minimum entre deux bases de vie. L’un d’eux n’avait emporté qu’un kilo de noix de cajou, toléré par le directeur de course, mais il n’est évidemment pas allé loin. D’autres ont joué avec leur propre sécurité, incapables de maîtriser leur GPS, se perdant en montagne en plein orage, au lieu de rester en groupe.

Ces choix individuels ont mené à des abandons, à des rancunes et, finalement, à un procès pour mise en danger de la vie d’autrui. Ce qui interpelle, c’est qu’au-delà des comportements déviants de certains participants, le niveau d’organisation n’a pas été suffisant pour anticiper ces dérives ni mettre en place les garde-fous nécessaires. L’absence de balises de géolocalisation, par exemple, a laissé planer une insécurité que quelques-uns ont perçue comme une mise en danger ou même une tromperie.

Durant ce procès, j’ai continué à soutenir Cyril Fondeville, apportant des témoignages en sa faveur. Mais une interrogation reste entière : cette édition « rustique » n’a-t-elle pas été le point de départ d’une fragilité organisationnelle qui allait marquer durablement l’histoire de la Transpyrénéa ?

Sur 279 partants, je faisais partie des 79 finishers à Hendaye, avec la fierté d’avoir été au bout, mais aussi la conscience d’avoir vécu une édition fondatrice… aux conséquences lourdes.

2023 – Retour de la Transpy et premiers incidents

Il a fallu attendre 2023 pour assister à un second départ. À cette occasion, Cyril m’a sollicitée pour prendre en charge les serre-files. J’ai donc constitué une équipe avec un ancien Transpy et je m’étais rendue disponible pour l’ensemble des 17 jours prévus.

Mais dès le premier jour, les difficultés sont apparues. Une concurrente, qui se trouvait logiquement en dernière position, refusait catégoriquement la présence des serre-files à ses côtés. Le lendemain, les choses se sont aggravées : elle est parvenue à semer le serre-file qui fermait la course. Le soir, nous avons tenté de la localiser à l’aide de son tracker. Celui-ci ne bougeait plus depuis plusieurs heures et se situait loin derrière le peloton, proche d’une barre rocheuse.

Vers 3 h du matin, face au danger potentiel, nous avons alerté Cyril. Celui-ci a contacté les secours (PGHM). La concurrente a finalement été retrouvée dans un refuge gardé.

Au lieu de saluer la vigilance de mon équipe, Cyril m’a reproché d’avoir donné l’alerte et, par conséquent, d’avoir déclenché l’intervention des secours. Cet épisode illustre à quel point l’organisation préférait minimiser les problèmes plutôt que de reconnaître ses propres manquements — quitte à mettre en jeu la sécurité d’une participante.

Jour 14 à Gabas – Quand la peur du procès prend le pas sur la sécurité

Le 14ᵉ jour, à Gabas, il restait un petit groupe de 5 ou 6 coureurs déjà en retard d’une journée. Depuis plusieurs jours, leur progression était inférieure à 50 km quotidiens, soit le minimum nécessaire pour espérer respecter le délai imposé par l’administration et franchir la ligne d’arrivée dans les temps.

Ayant Cyril au téléphone, et informée par des CP qui annonçaient leur fermeture, j’ai tenté d’ouvrir une discussion : proposer aux concurrents de s’arrêter — ils étaient encore à 300 km de l’arrivée — ou bien les avancer en voiture en « squizzant » la traversée de l’Ossau (environ 20 km). Cette suggestion a déclenché une vive colère, surtout de la part de leurs assistants (car oui, la plupart de ces retardataires en avaient).

La décision de Cyril a été claire : « tant pis, on laisse continuer ». J’ai insisté, rappelant que des CP fermaient et qu’il fallait impérativement tenir les 50 km par jour. Mais ses priorités semblaient ailleurs ( !).

Leurs sacs avaient déjà été allégés depuis un certain temps, et rien ne permettait de garantir qu’ils disposaient encore du matériel obligatoire. Mais le contrôle des sacs n’entrait pas dans mes responsabilités !

Finalement, en pressant le pas, ils ont terminé avec seulement un jour de retard sur la dead line fixée par la préfecture. Mais cela a eu un coût : plusieurs CP ont fermé, et certains n’ont pu rester ouverts que grâce à la bonne volonté de bénévoles qui ont prolongé leur présence, au-delà de ce qui était prévu sur le plan administratif.

Tout au long de l’épreuve, une chose est apparue flagrante : la préoccupation principale de Cyril semblait de vouloir éviter toute menace de poursuites judiciaires en cas d’abandon forcé par l’organisation. Le bien-être des coureurs passait au second plan. Sa stratégie était limpide : les laisser avancer jusqu’à épuisement, pour qu’ils abandonnent d’eux-mêmes.

L’arrivée – De la colère au règlement de comptes

À l’arrivée, alors que nous attendions les derniers concurrents, un début de débriefing a eu lieu avec Cyril Fondeville. Les bénévoles de Gabas étaient très remontés contre lui, mais lorsqu’ils sont venus à sa rencontre, il les a purement et simplement ignorés.

Pour ma part, la sanction est tombée deux jours plus tard : Cyril m’a exclue de tous les groupes WhatsApp de l’organisation. Comme si cela ne suffisait pas, il a publié un texte truffé de sous-entendus à mon encontre. J’ai réagi en rédigeant un « droit de réponse ».

À ce moment-là, plusieurs bénévoles m’ont apporté leur soutien, ne comprenant pas ce déferlement de haine dirigé contre moi. Mais Cyril a exigé que je retire mon texte, sous peine de poursuites judiciaires. Non content de m’avoir isolée, il m’a également rayée de la liste officielle des finishers.

Griefs supplémentaires – Bénévoles exploités et insuffisamment considérés

Au fil de la Transpy 2023, j’ai assisté à plusieurs échanges entre Cyril et les bénévoles. Sa manière de s’adresser à eux m’a souvent choquée : j’ai eu le sentiment qu’il considérait les bénévoles comme de simples exécutants.

Il m’a été reproché d’avoir dormi au sec, à Gabas, avec les autres serre-files dans un logement avec lits mis à disposition par les bénévoles du CP. Selon Cyril, cela lui avait coûté trop cher : nous aurions dû, d’après lui, dormir dehors dans des tentes.

Après qu’il m’a exclue de tous les groupes WhatsApp, je n’ai même pas osé réclamer le remboursement de mes frais. Pourtant, mes allers-retours pendant les dix jours passés sur le parcours représentaient au moins deux pleins d’essence, plus les frais d’autoroute.

L’absence d’attention portée aux bénévoles se voyait dès le premier CP d’Arles-sur-Tech. Nous étions arrivés en fin d’après-midi, chargés de tenir le poste jusqu’au lendemain matin, mais aucune nourriture n’avait été prévue pour nous. Certains ont dû acheter des pizzas à leurs frais. Pour ma part, j’avais anticipé et apporté quelques provisions que j’ai partagées avec d’autres bénévoles et même des participants.

Ce n’était pas une première. Déjà en 2016, je me souvenais du CP de Luz, où les bénévoles avaient acheté eux-mêmes de quoi cuisiner des repas plus appétissants pour les coureurs… et probablement pour eux aussi. Mais rien n’avait été remboursé.

Au fond, le système est simple : certains bénévoles reviennent, d’autres pas. Cyril garde ceux qui donnent sans compter et dont il peut tout exiger, sans jamais garantir clairement un dédommagement. Ceux qui osent demander un remboursement, ou simplement exprimer un désaccord, semblent devenir indésirables.

En guise de conclusion – La Transpy oublie l’essentiel : l’humain

J’ai été bénévole sur plusieurs organisations. À chaque fois, nous avons été bien traités, logés correctement, nourris convenablement, et toujours remerciés — parfois même autour d’un repas d’après-épreuve, organisé quelques semaines ou mois plus tard. Rien de tout cela n’existe à la Transpy.

Le concept de la Transpy est « rude », soit. Mais cela ne justifie en rien le traitement réservé aux bénévoles. Ceux-ci devraient être considérés avec dignité, disposer de conditions de repos acceptables et bénéficier d’une alimentation correcte.

Quant aux participants, tout dépend bien sûr de la vision de l’organisateur. Mais avec un seul ravitaillement par jour, il paraît évident qu’ils devraient pouvoir se restaurer un minimum. Les bénévoles se donnent à fond pour cela, encore faudrait-il qu’on leur fournisse les ingrédients nécessaires et avec une qualité décente.


Nathalie Wurry, le 15 Novembre 2025

Point info

Pour toutes questions relatives aux dossiers de préparation, n’hésitez-pas à contacter :
Eric CHAIGNEAU
animateur bénévole des Amis GRdistes.
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